Colloque ISATT2022 2/2 - Philippe TREMBLAY

6 octobre 2022
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Professeur titulaire à l’Université Laval, Québec
Aujourd’hui professeur en Sciences de l’éducation à l’Université Laval à Québec, Philippe Tremblay
a longtemps travaillé, en Belgique, comme instituteur primaire en enseignement ordinaire et
spécialisé. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et articles portant sur le coenseignement et sur
l’École inclusive. Ses recherches portent sur la mise en œuvre, l’étude et l’évaluation des dispositifs
de scolarisation des élèves à besoins spécifiques.
Les fondements éthiques de l’École inclusive
L’École inclusive s’appuie sur un principe éthique, celui du droit pour tous à fréquenter l’école
ordinaire (Plaisance et al., 2007). Elle pose le concept d’éducabilité universelle (Prud’homme et al.,
2011) et s’oppose à l’exclusion ou la mise à l’écart de certains enfants sur la base de leurs
caractéristiques (Plaisance et al., 2007). Dans cette perspective, la difficulté et le handicap sont
principalement reliés à l’environnement scolaire, aux obstacles et barrières que l’institution scolaire
peut dresser à la participation et à la réussite des élèves. L’UNESCO définit l’Éducation inclusive
comme « le moyen le plus efficace de combattre les attitudes discriminatoires par la création de
communautés accueillantes, en édifiant une société intégrative et en atteignant l’objectif de
l’éducation pour tous » (2009, p. 13). Cette nouvelle conception suppose l’émergence d’une École
inclusive pratiquant une pédagogie différenciée pour tout un chacun (Thomazet, 2008). Il s’agit ainsi
de rendre l’École accessible sur les plans physiques, pédagogiques et curriculaires (Benoit, 2014 ;
Ebersold, 2021).
En somme, l’École inclusive se définit par des actes (différenciation, adaptation, pratiques
probantes, etc.), une prise en compte des conséquences de ces actes et du système dans lequel ils
s’inscrivent (exclusion, diplomation, réussite éducative, etc.) et enfin sur des valeurs (équité,4
éducabilité, éloge de la diversité, etc.). Il s’agit d’un processus dans lequel l’école essaie de répondre
aux besoins de tous (Sebba et Ainscow, 1996 ; UNESCO, 2009), ce qui suppose un changement
de paradigme (Clark, Dyson, Millward et Robson, 1999; Plaisance et coll., 2007; Tremblay, 2012).
Cette transition s’est appuyée sur plusieurs types de remise en question de l’enseignement
spécialisé (et des concepts liés) utilisant de multiples registres de justification. Dès 1975, Kauffman,
Gottlieb, Agard et Kukic ont distingué différentes pressions ou forces agissant en faveur de
l’intégration puis de l’inclusion scolaire : les influences philosophiques, les contributions empiriques,
l’impact des décisions des tribunaux et l’effet des politiques gouvernementales en matière
d’éducation. Vienneau (2002) analyse les fondements historiques et propose deux fondements :
empiriques et philosophiques et éthiques. Tremblay (2012), quant à lui, classe ces fondements en
trois grandes catégories : (Tremblay, 2012).
1 — Les fondements politiques (conventions internationales, législations, jugements, groupes
de pression, etc.)
2 — Les fondements pédagogiques (modèle social du handicap, (dé)normalisation,
transférabilité des pratiques, etc.)
3 — Les fondements scientifiques (efficacité absolue ou relative, perçue et réelle, efficience,
fiabilité, impact, etc.).
Dans le cadre de cette conférence, ces trois fondements de l’École inclusive seront analysés en
s’appuyant sur les trois principales théories qui encadrent l’éthique normative : 1) le déontologisme
(appréciation, a priori, de certains actes comme étant moralement requis et d’autres comme étant
moralement prohibés), 2) le conséquentialisme (appréciation de la moralité d’un acte en fonction de
ses conséquences sur le bien-être général) et 3) le vertuisme (appréciation de l’épaisseur morale
des agents, au-delà des actes posés) (Prairat, 2015 ; Lewin, 2014). Cette analyse contextualisée
sur la base des forces, faiblesses et limites de ces théories permettra de dessiner et de discuter les
contours d’une éthique pour les enseignantes et enseignants engagés dans la construction et le
développement d’une École inclusive.
References
Clark, C., Dyson, A., Millward, A. & Robson, S. (1999). Theories of inclusion. Theories of schools :
deconstructing and reconstructing the “inclusive school”. British Educational Research Journal, 25(2), 157-
178.
Ebersold, S. (2021). L’accessibilité ou la réinvention de l’école. ISTE Group. Kauffman, J.M., Gottlieb, J.A.,
Agard, J. et Kukic, M.B. (1975). Mainstreaming : Toward
an explication for the construct. In Alternatives for Teaching Exceptional Children, E.L. Meyen, G.A. Vergason
et R.J. Whelan (Eds), Denver (CO) : Love Publishing Company.
Lewin, D. (2014) What’s the use of ethical philosophy? The role of ethical theory in special educational needs,
European Journal of Special Needs Education, 29(4), 536-547.
Plaisance, E., Belmont, B, Vérillon, A. et Schneider, C. (2007). Intégration ou inclusion? Éléments pour
contribuer au débat, La nouvelle revue de l’adaptation et de la scolarisation, (37), 159-164.
Prairat, E. (20145). Quelle éthique pour les enseignants ? Éditions de Boeck : Bruxelles.
Prud’homme, L., Vienneau, R., Ramel, S. et Rousseau, N. (2011). La légitimité de la diversité en éducation :
réflexion sur l’inclusion. Éducation et francophonie, 39(2), 6–22.
Sebba, J. et Ainscow, M. (1996). International developments in inclusive schooling: Mapping the issues.
Cambridge Journal of Education, 26(1), 5-18.
Thomazet, S. (2008). L’intégration a des limites, pas l’école inclusive ! Revue des sciences de l’éducation,
34(1), 123- 139.
Tremblay, P. (2012). Inclusion scolaire : dispositifs et pratiques pédagogiques. de Boeck : Bruxelles.
UNESCO (1994). Déclaration de Salamanque et cadre d’action pour l’éducation et les besoins spéciaux.
Conférence mondiale sur l’éducation et les besoins éducatifs spéciaux : accès et qualité. UNESCO : Paris.
UNESCO (2009). Principes directeurs pour l’inclusion dans l’éducation. UNESCO : Paris.
Vienneau, R. (2002). Pédagogie de l’inclusion : fondements, définitions, défis et perspectives, Éducation et
francophonie, XXX(2), 257-286

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